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|Brochures] Pour une agriculture sans exploitation animale

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Ce qui donne à l’agriculture et aux luttes paysannes autant de potentialités révolutionnaires sont les perspectives d’autonomie et de résistance que permet la prise en main des moyens de production fondamentaux pour avoir de quoi manger, s’abriter, se vêtir, se soigner. Mais comment subvenir à nos besoins de base sans pour autant avoir à être exploité-es, à exploiter d’autres humains et animaux ou à détruire les écosystèmes ?

Ce texte va donc parler de la viabilité matérielle, sociale et de l’intérêt politique d’une agriculture sans exploitation animale. Les savoirs à ce sujet sont largement méconnus, sous-diffusés voire invisibilisés. Il existe pourtant, dores et déjà , beaucoup de données, tant théoriques que pratiques qui montrent que, dans les régions où l’agriculture est possible, on n’a pas forcément besoin d’élevage pour produire les denrées dont dépend notre subsistance !

Et disons-le tout de suite, dans une dynamique de lutte contre les rapports de domination, on ne peut pas et on ne veut pas réformer l’élevage. Qu’il prenne place dans des usines ou au fond du jardin, que son but soit commercial ou d’auto-subsistance ; une cage reste une cage, quelle que soit sa taille, sa forme ou la longueur de la chaîne !

Chapitre 1

Avant-propos

On est quelques personnes impliquées dans des perspectives de luttes anarchistes et antisṕecistes qui ont consacré pas mal de temps de leur vie à l’agriculture, autant de manière pratique, en cultivant, que théorique, en discutant avec des gens, en lisant des bouquins et en ayant eu le privilège de faire des études universitaires dans des domaines comme la biologie, l’écologie et l’agronomie. C’est à partir de ce point de vue qu’on a eu envie d’écrire ce texte.

Ensuite, notre point de départ concret est la revendication politique d’essayer de s’opposer à toutes les formes de domination et d’oppression. C’est ce qui nous pousse à lutter contre l’exploitation des animaux non-humains par les animaux humains et à essayer de déconstruire et de détruire l’idéologie et la construction sociale du spécisme. Spécisme qui amène certains et certaines à se penser supérieur-es, à enfermer, exploiter et tuer d’autres qui essayent pourtant comme eux et elles de vivre libres et sans souffrance. Tout ̧ ca par le simple fait qu’il n’y a prétendument que l’humanité qui compte vraiment et donc que ces êtres inférieurs ne seraient bons qu’à nous servir puisqu’ils ne font pas partie de la bonne espèce, ils ne sont pas humain-es.

Dans ce texte, on a eu envie de se concentrer sur une des facettes de l’exploitation animale, probablement parmi les plus abjectes, et qui est clairement la plus répandue ainsi que la plus fréquemment justifiée comme indispensable à nos vies : l’élevage. Disons-le tout de suite, du point de vue de l’oppression on ne peut pas et donc on ne veut pas réformer l’élevage. Qu’on ne vienne pas nous parler de tel fermier progressiste qui aménage à ses cochons un enclos d’un espace quatre fois plus grand que celui des voisins ou de tel collectif qui n’élève des chèvres ou des poules que pour leur lait ou leurs œufs. Il ne peut pas y avoir d’élevage sans meurtre. Ne serait-ce que pour une question de contrôle démographique. Le petit mâle doit être tué parce que, quand il sera grand, il ne fera pas de lait ou d’œufs et de toute façon trop de mâles confinés dans des conditions d’élevage créeraient des situations de conflits ingérables. De plus, la question de la mise à mort n’est de loin pas tout, parce qu’il ne faut pas se leurrer, celles de l’enfermement et du contrôle des individus resteront toujours des aspects inhérents à l’élevage. On ne peut pas tout le temps prendre en compte, quand on est éleveur ou éleveuse, la exemple, volonté et le bien-être des animaux. ça irait à l’encontre du principe même de production et de profit. A partir du moment où on fait se reproduire des animaux sous notre emprise pour tirer profit de ce qu’ils ou elles produisent, il y a forcément la limite où les humain-es font passer leurs intérèts au-dessus de ceux de « leurs bêtes ». Que l’élevage prenne place dans des usines ou au fond du jardin, que son but soit commercial ou d’auto-subsistance ; une cage reste une cage, quelle que soit sa taille, sa forme ou la longueur de la chaîne ! Pour qui se pose sincèrement la question de la lutte contre les rapports de domination, cette forme d’exploitation ne peut qu’être combattue et abolie.

Le but de ce texte

Maintenant qu’on a posé en quoi il est politiquement souhaitable de lutter contre l’exploitation animale, et donc contre l’élevage, on va se faire une joie de montrer en quoi il est matériellement possible, souvent pas plus difficile, voire carrément plus simple de survivre en tant qu’humain-e sans devoir exploiter les autres animaux.

Ce désaccord profond avec la pratique de l’élevage implique en conséquence une remise en question d’un large pan de l’agriculture. Et c’est sur ce dernier point qu’il s’agit de porter toute notre attention si on ne veut basculer ni d’un côté dans la défense du petit élevage, ni d’un autre dans un mépris urbain et classiste des petit-es éleveur-euses. De fait, être antispéciste ne nous empêche pas, et bien au contraire nous pousse à faire partie des luttes paysannes, à nous réapproprier les moyens de production alimentaire et de là à nous solidariser et à penser nos alliances avec d’autres paysan-nes en luttes dont une partie fait de l’élevage. C’est comme dans beaucoup d’autres luttes en fait ; les solidarités et les alliances sont souvent parcourues de contradictions et de tensions.Il est parfois important et nécessaire de lutter aux côtés de personnes avec qui on partage une cause mais avec lesquelles on peut être, par ailleurs, en profonde opposition sur certains points. Un rejet en bloc peut parfois avoir du sens, parfois pas.

Ceci étant dit, il n’y a de loin pas tous-tes les paysan-nes en lutte qui ont recours à l’ ́elevage et un petit nombre y est même ouvertement opposé. L’ ́elevage, bien que très répandu et ancré dans des pratiques traditionnelles qui ont fait leurs preuves, reste une manière, parmi d’autres, de produire les denrées dont dépend notre subsistance. Il ne représente ni une nécessité d’un point de vue agricole ou alimentaire ni une composante impérative des luttes paysannes, même s’il en fait souvent partie ! Ce qui donne aux luttes paysannes autant de potentialités révolutionnaires sont les possibilités d’autonomie et de résistance que permet la prise en main des moyens de productions fondamentaux, mais c’est aussi un rapport direct à notre alimentation, à la terre et à l’environnement.

Eh oui, dans les régions où l’agriculture est possible, on n’a pas forcément besoin de prédation et encore moins d’élevage pour subvenir à nos besoins ! C’est pour cela que le but principal de ce texte, parlant d’autonomie alimentaire par l’agriculture sans exploitation animale, va donc être de fournir des infos et de casser les idées reçues et les mythes qui amènent nombre de personnes à se résigner et à considérer comme incontournables, non seulement l’agriculture industrielle, mais aussi des modèles d’auto-subsistance agricole traditionnelle s’appuyant sur l’ élevage.

Notre critique sera d’ailleurs résolument plus ciblée sur ces formes d’agriculture souvent présentées comme les seules viables puisque traditionnelles, tout en étant les « plus respectueuses possibles des animaux non-humains ». Histoire de prendre le problème à la racine et parce que, de toute façon, ce qui est valable pour l’élevage artisanal risque de l’être d’autant plus pour l’élevage industriel.

Les connaissances ayant trait à l’agriculture sans exploitation animale sont largement méconnues, sous-diffusées voire invisibilisées. Il existe pourtant dores et déjà beaucoup de données, tant théoriques que pratiques, qui soutiennent la viabilité matéielle, sociale et l’intérêt d’une telle agriculture. Après, c’est clair qu’il reste beaucoup à faire dans ce domaine et qu’il existe de nombreuses questions en suspens et des problèmes de taille à résoudre. Mais il s’agit d’un processus révolutionnaire... Une fois la question politique tranchée, les réponses concrètes à apporter sont d’ordre technique et social et il est vraisemblable que nombre de problèmes pratiques que l’on rencontre actuellement trouveront des solutions qu’on ne peut encore qu’effleurer aujourd’hui. Les pistes ne manquent pas et, en aucun cas, des difficultés qui se dressent sur le chemin vers un monde plus égalitaire ne doivent servir de prétexte à ne rien faire !

Pour finir, en visant à construire un discours antispéciste qui laisse le moins d’accroche à de possibles glissements néocoloniaux et racistes, il nous paraît important de partir de qui on est et de bien réfléchir à qui on parle. On est bien conscient-es de la grande disparité des types de sociétés agricoles existant sur Terre. Celle-ci est due d’abord aux variations d’origine écologique et aussi beaucoup à de grandes inégalités d’accès aux ressources sur cette planète. On est aussi conscient-es d’écrire depuis un statut fait de privilèges, du fait notamment qu’on vit légalement en Europe et qu’on a de ce fait un statut dominant par rapport à la plupart des régions du monde. On n’a pas envie de venir en colons moralisateurs imposer notre façon de faire, nos luttes. Bien que nous pensions que l’oppression spéciste et l’idéologie de la suprématie humaine sont partout critiquables pour ce qu’elles sont ; des formes poussées d’injustice et de domination, on aimerait faire attention à la question de savoir de qui vient cette critique, à qui elle s’adresse et sous quelle forme. On va déjà essayer de balayer devant notre porte !

C’est pour ça que le ton parfois incisif et offensif de ce texte n’est pas premièrement destiné aux petits ́eleveur-euse-s vivant dans un pays pauvre très loin d’où l’on habite, mais bien aux personnes que l’on côtoie qui jouissent de positions et privilèges proches des nôtres, paysan-nes de nos alentours. Ce texte se veut aussi être une critique énervée et de nombreuses fois répétée aux personnes de notre milieu militant qui, partant d’une même base politique qui leur fait cracher sur ce système oppressif et et considérer la reprise en main de notre production alimentaire comme un élément indispensable à une émancipation collective, passent souvent à côté du fait qu’ils et elles endossent un rôle d’oppresseur, une fois accompli leur retour à la terre spéciste.
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A partir du moment où une poule morfle derrière son grillage, ce qui arrive quelque que soit l’origine sociale de son propriétaire, c’est une chose qui peut être prise en compte comme une oppression et à laquelle des personnes concernées peuvent légitimement s’opposer. Toute la question est d’être attentif-ve à comment on parle de cette oppression suivant qui on est. Les luttes sont à mener partout, mais par les personnes concernées en fonction des contextes.
Elles ne doivent pas être contrôlées par des occidentaux depuis les pays riches, mais par les différents groupes qui existent dans les régions du monde et qui luttent localement contre l’exploitation
animale depuis leur position. Ceci n’empêche bien sûr pas à des idées et des pratiques d’être échangées à travers les frontières et les continents et qu’elles représentent un intérêt et portent du sens une fois réappropriées dans d’autres contextes sociaux et dynamiques de luttes.

Méthode

En écrivant ce texte, nous avons choisi de nous référer notamment à un certain nombre de connaissances issues de l’écologie et de la biologie, mais aussi de l’histoire. Nous sommes conscient-es du grand pouvoir oppressif de la science, mais on pense qu’il existe une marge de manœuvre dans l’utilisation de ces connaissances quand elle implique dans son fonctionnement de base la tentative de rester ouvert-e à la critique et à la remise en question, et de fournir des bservations - en théorie - vérifiables et reproductibles.

Sans grande surprise, les différentes notions et données qu’on a utilisées dans ces pages ne proviennent le plus souvent pas d’observations personnelles, mais elles ne tombent pas non plus du ciel. Elles sont pour la plupart le fruit de dizaines d’années de recherches, qu’ici nous n’avons fait que reprendre, comprendre, résumer et recontextualiser. Sans grande surprise non-plus, et comme c’est très souvent le cas dans les domaines scientifiques, de nombreuses sources citées ici, bien que rigoureuses, ont des provenances assez dégueulasses, voire même ennemies. . . En effet, en agronomie par exemple, les plus grandes ressources financières sont allouées à de grosses institutions visant à réformer, améliorer et donc perpétuer l’exploitation animale ou des formes d’agricultures destructrices.
Pourtant, les données ainsi produites peuvent quand même se révéler pertinentes - il y a peu de chance qu’une recherche pro-élevage exagère les nuisances que ce dernier engendre - et peuvent, sous certaines conditions, êre réutilisées à des fins critiques.

On a décidé de citer au fil du texte la source de certaines informations précises et pour ne pas trop alourdir la lecture, de réserver les références plus générales à une bibliographie à part en fin de texte.
De plus, un lexique a aussi été constitué, afin de donner nos définitions de certains termes, parfois compliqués, que nous avons trouvé utile d’employer dans ces pages.

pour lire la suite de cette brochure, l’imprimer et la diffuser c’est sur infokiosque.net

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