En 2014, je découvrais la ZAD du Testet et m’y investissais pour empêcher le début des travaux du barrage de Sivens. J’y découvre les pratiques anti-autoritaires, l’idéologie vegan, la zone humide, une passion pour les palettes et les bambous, la camaraderie, le militantisme qui se vit comme un quotidien. La joie d’être en apprentissage permanent et d’expérimenter une forme de vie nouvelle me fait très vite aimer ce lieu et ces gentes. Je met toute mon énergie dans cette lutte écologique et politique.
Quelques mois plus tard, je démissionne de mon taf, écœurée par l’avancée si rapide des travaux et reviens sur le terrain pour tenter de voir la ZAD du Testet continuer d’exister. Cela fait six mois que je n’étais pas venue et ce matin-là, nous nous opposons à une expulsion illégale sur le site de Gazad. Un gendarme du PSIG jette alors une grenade de désencerclement (16 plots en caoutchouc à 400 km/h…) dans la caravane où nous sommes réfugiés avec trois amis. La scène est filmée de l’intérieur par un ami. Ma main, très proche de l’explosion, est dans un sale état. La douleur se repend.
Je suis opérée en urgence, passe dix jours à l’hopital Purpan et me retrouve isolée. Quelques jours plus tard, j’apprends par téléphone la mort d’un manifestant lors du rassemblement festif du 25 octobre. La destruction est totale. Tout est perdu et les bons souvenirs disparaissent sous l’immonde tas de gravats qu’il me reste de cette lutte.
Il y a pour moi un avant et un après au 7 octobre 2014. Se reconstruire après ça fut un véritable parcours de la combattante. C’est aujourd’hui seulement que je perçois ma chance : j’ai une famille proche qui m’a recueillie et soutenue, d’autres ami.es qui ont su être présentes, j’ai eu accès à des soins et j’ai retrouvé l’usage de ma main. La vidéo de l’intérieur a permis de faire aboutir ma plainte : le Marechal des logis, Mr Vilamanya passera en procès le 8 janvier 2019 pour violence aggravée par deux circonstances suivi d’incapacité supérieure à 8 jours.
En France, l’institution juridique n’apporte pas la réparation nécessaire aux victimes. C’est juste une épreuve supplémentaire pour elleux.
Ce qui me répare, c’est de pouvoir à nouveau militer, c’est la confiance que j’ai retrouvée pour ne plus être envahie par la panique et l’angoisse face aux keufs.
Ce qui me répare, c’est d’avoir du soutien au TGI de Toulouse le 8 janvier face au gendarme et à l’État qui m’a blessé.
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