Pour celles et ceux qui ne capteraient pas grand chose à ce qui s’est passé sur la ZAD de NDDL ces dernières années, tenter de comprendre les conflits autour du Rosier peut être l’occasion de rattraper le train en marche et d’y voir plus clair. Si ça t’intéresse, des articles et brochures sont mis en lien en fin de texte pour avoir un meilleur aperçu des différentes positions politiques qui s’affrontent toujours sur la zone et au-delà.
Tentative de brève remise en contexte général sur zone :
Depuis l’opération d’expulsion par l’Etat d’une partie des lieux de vie de la ZAD en 2018, le rapport de force sur zone semble très favorable aux partisan.e.s de l’ordre (qui s’organisent notamment au sein de l’Assemblée des Usages), qui ont aidé la préfecture à « nettoyer » la zone des « éléments indésirables », c’est-à-dire des personnes qui ont refusé de jouer le jeu du pouvoir, de négocier avec la préfecture, de signer des fiches de projets, d’accepter la normalisation de la zone.
Beaucoup de monde a quitté la ZAD depuis 2018 (et avant), par fatigue/dégoût/besoin/(...), souvent usé.e.s par le combat contre des gens et groupes qui s’organisent au sein du CMDO et des associations citoyennistes, se regroupant au sein de l’Assemblée des Usages, mais aussi par celles et ceux qui ont permis que leurs manoeuvres politiciennes (appelées « stratégie ») prennent de l’ampleur et ne rencontrent pas suffisamment de résistance pour les contrer (POMPS, CHIPS...). Ces groupes ne sont pas uniformes, loin de là, et ne poursuivent pas les mêmes buts, mais ont réussi tant bien que mal à mettre de côté ce qui les éloigne pour « sacrifier » sur l’autel de la normalisation une partie des habitant.e.s de la zone.
Ce « sacrifice » d’une partie des habitant.e.s ne s’est pas faite sans coups de force, intimidations et prises de pouvoir au sein du « mouvement », dont nous pouvons citer quelques exemple marquants :
- S’accaparer le site zad.nadir, pour ne plus diffuser que leurs seules versions des faits, (par exemple zad.nadir ne diffusait pas d’appel à soutien aux expulsé.e.s de l’Est de la zone en 2018, ou le texte de l’équipe radio klaxon censuré et réécrit, entre autres).
- Confisquer les listes mail des comités de soutien pour en maitriser le contenu.
- Créer un groupe presse autoproclamé porte-parole des habitant.e.s.
- Créer une « Assemblée des usages » au fonctionnement opaque, avec des groupes fermés accessibles par cooptation et déjà créés avant même la première assemblée, pour contrer et tuer à petit fe l’Assemblée du mouvement, ouverte à quiconque voulait y dire quelque chose.
- Dégager contre la volonté d’une bonne partie du « mouvement », en manipulant l’AG, la route des chicanes (D281) et ses habitant.e.s, avec tracteurs, pression psychologique intensive auprès des récalcitrant.e.s, ce qui a permis aux forces de l’ordre de mener une grande opération de renseignements en vue de l’expulsion, en occupant ladite route pendant plus d’un mois.
- Expulser à coups de poings et détruire la cabanne Lama Fâché au pied de biche en janvier 2018.
- Démonter des barricades pendant les expulsions de 2018, dans le dos des personnes qui les ont montées parfois, en le décidant de leur côté sans en parler collectivement. Ah ! Les fameuses décisions collectives qu’on reproche aux autres de ne pas appliquer.
- Tabasser et kidnapper (en cassant des membres) des personnes en les mettant dans des coffres de bagnoles, une parce qu’elle s’opposait aux travaux sur la route des chicanes, l’autre parce qu’elle voulait continuer à utiliser la ferme de Bellevue.
- Déposer des fiches sur des lieux occupés par d’autres, sans leur accord.
- Signer des Convention d’Occupation Précaires (COP) auprès de la préfecture, qui engage notamment à empêcher toute construction et nouvelle installation.
Une liste plus complète des manipulations et autres magouilles politiciennes serait beaucoup plus longue, et les brochures en lien à la fin du texte racontent déjà tout ça très bien, mais c’est un bon aperçu de ce que les gens qui fréquentent l’Assemblée des Usages sont prêt.e.s à faire pour s’accaparer des terres et des bâtiments, et surtout l’aura de radicalité qui flotte toujours autour malgré tout.
Maintenant, une brève contextualisation de l’ambiance au Rosier :
Il y a des conflits d’usage et de propriété autour du Rosier depuis de nombreuses années. En résumé, il y a deux volontés antagonistes qui s’affrontent. D’un côté, à la Riotière, des squatteureuses aspirant.e.s propriétaires qui veulent légaliser leur situation, soutenu.e.s par un réseau alter-radical-citoyen (CMDO, assemblée des usages, NDDL poursuivre ensemble...) et d’une milice qui a déjà fait les peuves de son « efficacité » sur zone. Du côté du Rosier, d’autre squatteureuses, pourtant les seules légitimes à prendre des décisions concernant ce lieu vu qu’ielles l’habitent, mais qui sont pourtant menacé.e.s d’expulsion par leurs voisin.e.s déterminé.e.s à les virer à tout prix. Mais pourquoi ?
Le Rosier est un ancienne ferme laissée à l’abandon après son rachat par le conseil général, dont les terres et bâtiments agricoles étaient utilisés par un agriculteur du coin. En 2007, un groupe de personnes déterminées à lutter contre le projet d’aéroport a commencé à occuper la maison. Depuis, le Rosier a continuellement été habité par différents collectifs d’habitations qui se sont recomposés au fil du temps, malgré la destruction des bâtiments par l’Etat en 2012 pendant « l’opération César ».
L’installation de troupeaux de moutons sur les terres autour du Rosier en 2013 a toujours été source de conflits. Les gens du groupe mouton ( surtout Q. puis V., et plus récemment A. qui habite avec V. à la Riotière Sud-Est) ont imposé cet élevage sur quasiment tous les terrains qui entourent le Rosier contre l’avis d’habitant.e.s. Depuis, illes n’ont pas voulu laisser autre chose ni personne vivre au Rosier, à part leur projet agricole, d’où leur acharnement, même après de nombreuses discussions, pour imposer une bergerie à la place de l’espace collectif du Rosier. Le groupe mouton a fini par se dissoudre et être repris par V.. Une des personnes moteur de l’élevage, Q., est finalement partie du Rosier suite notamment aux nombreuses embrouilles générées par l’obstination du groupe mouton à occuper tout l’espace de manière autoritaire.
Ce projet d’élevage a été soutenu depuis le début par certaines personnes de COPAIN et d’autres occupant.e.s de la zone, qui les ont régulièrement aidé depuis un bail. Ce conflit récurrent est toujours très vif avec l’actuel collectif d’habitant.e.s du Rosier, malgré ses différentes recompositions ces dernières années.
L’argument de fond des pro-élevage est que la priorité et la légitimité doivent être données aux personnes qui ont une activité agricole valorisée socialement : l’élévage ou les cultures à moyenne échelle. C’est le parti-pris de l’assemblée des usages. Et c’est précisément la raison pour laquelle il y a un conflit : les gens de la Riotière se sentent la légitimité de dégager des gens de chez elleux pour y installer tranquilou et légalement leur business de viande.
Rappelons au passage que :
- cet élevage de moutons est un projet porté par des voisin.e.s de la Riotière, qu’aucun.e habitant.e du Rosier ne soutient depuis des années, mais qui fait pourtant chier tout le monde et oblige les gens qui y vivent ou ont l’habitude d’y passer a se plier à ces pratiques imposées de l’extérieur.
- Le groupe d’habitant.e.s de la Riotière ont fait savoir à de nombreuses reprises qu’illes entendaient avoir un contrôle sur qui habite au Rosier.
- V. de la Riotière mène une campagne de harcèlement contre les habitant.e.s qui se sont succédé.e.s au Rosier ces dernières années.
- Les gens de la Riotière ont chois leur camp, ce qu’illes clament à longueur d’interview,, ou quand illes recoivent la préfète Nicole Klein à la Riotière en 2018 (vers 56 min, on voit notamment A. et V. en train de draguer Nicole en lui faisant le tour du propriétaire)
La Riotière et leurs allié.e.s entretiennent depuis des années des relations exécrables avec les gens du Rosier, par désaccord politique, mais aussi pour faire monter la tension et décourager les gens d’y habiter. Les bâtiments de l’ancienne ferme du Rosier, détruits en 2012, étaient inscrits au cadastre, ils sont donc reconstructibles légalement. Le Rosier est donc un gros enjeu pour la Riotière, car c’est pour le moment le seul endroit du coin où il est légal de construire, ce qui est primordial dans leur délire de légalisation.
Pour mener à bien leur statégie d’accession à la propriété du Rosier, V. A. et leurs potes ont choisi de fonder leur légitimité sur le droit, et sur la force. A. a signé une fiche de projet pour le Rosier, puis une Convention d’Occupation Précaire, pour enfin signer un bail de 9 ans, vous l’aurez compris, sans l’accord des réel.e.s habitant.e.s.. A. a aussi récemment signé une demande de permis de construire sur l’ancienne maison du Rosier détruite en 2012, attenante au hangar qui sert en partie de lieu de vie au collectif actuel du Rosier. Une des personnes visées par ces volontés d’expulsion, J., a lui aussi signé un demande de permis de construire pour tenter de contrer celui de A., on comprend donc qu’il puisse devenir gênant dans leur projet d’expulsion.
V. et A. ont construit un hangar à l’entrée du Rosier, puis une nouvelle cabane en 2017 pour y habiter, et en bon communicant.e.s colonialistes l’ont appelée « Rosier Nord ». Derrière cette tentative qui peut paraître grotesque, il y a le but de se donner une légitimité, et de faire croire qu’illes habitent bien au Rosier. Bah quoi, si si, c’est marqué dessus. Dernière utilisation orwellienne en date de ce stratagème, la soi disant présence d’habitant.e.s du Rosier lors de l’Assemblée des Usages pendant laquelle a été prise la décision de justice de virer des habitant.e.s du... Rosier ! Cette action paraît légitimée par le fait que des gens du Rosier y participent en apparence, on oublie juste de mettre Nord, et hop hop ni vu ni connu jtembrouille [1]. On peut rappeler au passage qu’une personne tentant d’argumenter contre l’expulsion prévue au Rosier a été exclue physiquement de cette AG.
Par contre, pas d’indignation judiciaire ni de procession d’expulsion quand en novembre dernier, V. vole une caravane qui se trouve dans la cour du Rosier et qui appartenait au collectif du Rosier, puis incite J.G., habitant de la Riotière, à y installer sa caravane à la place dans la même journée, pour coloniser un peu plus l’espace. Ni quand deux personnes viennent demander des comptes sur cette histoire de caravane, et qu’elles se prennent des coups de latte par V. ou que J.G. donne un coup de hache à quelque centimètres d’une de ces deux personnes qui était assise sur une palette, faisant exploser cette dernière. L’impunité policière quoi.
Récents rapports de force spectaculaires pour virer les habitant.e.s du Rosier :
-Dimanche 16 février 2020, à la demande de A. et V., une cinquantaine de personnes sont venues mettre la pression à des habitant.e.s du Rosier (à défaut de virer les gens et péter/brûler leurs cabanes comme elles le projetaient dans leur AG des usages) en instrumentalisant des prétextes bidons (blablabla « des chiens en liberté » à des moments mais qui n’ont jamais attaqué quelque brebis que ce soit, blablabla de soi-disant menaces sur un enfant...) pour arriver à leurs fins : s’approprier le Rosier.
-Dimanche 23 février 2020, rebelote sur un autre mode : les voisin.e.s vigilant.e.s de la Riotière-Sud-Est, accompagné.e.s de leurs soutiens, sont venu.e.s à une vingtaine pour vider ce qui était un atelier collectif à l’usage des habitant.e.s du Rosier et de qui en avait besoin, volant au passage les outils collectifs qui y étaient entreposés.
-Samedi 21 mars 2020 une cabane du Rosier servant de sleeping est incendiée. Zad.nadir se sent obligé de publier un communiqué où on peut lire « Cet acte est d’autant plus regrettable qu’il intervient à un moment où un dialogue sur des cadres de cohabitation vivable s’élabore entre la plupart des habitant.es du rosier. Il faut que celui-ci puisse enfin se mettre en place. Nous continuerons à travailler en ce sens. »
Les gens qui ont écrit ce communiqué en profitent pour continuer à justifier le tri qu’iels opèrent sur les habitant.e.s du rosier. C’est ça les communs, on peut te dire ce que tu peux faire ou pas dans ton squat, qui peut y habiter ou pas... Semblerait-il, des violences sexistes et le non-respect des règles collectives (lesquelle ça n’est pas précisé, probablement celles de la Riotière) ça mène à se faire dégager ses affaires sur une aire d’autoroute pour se faire expulser. Soyons certain.e.s que l’auteur autoproclamé de l’incedie, dont tout le monde sur zone connaît l’identité, ne se fera pas dégager, pour le coup ça doit respecter leur charte.
Si on traduit ce communiqué écrit en novlangue ça donne : « On choisit ce qui se passe au Rosier. On viens à 10 virer une personnes de chez elle, on lui vole ses affaires et on les dépose sur une aire d’autoroute. » C’est de cette manière que zad.nadir raconte que le même jour J., un habitant du Rosier « relou » (!), qui compromettait les plans d’accession à la propriété de A. et V. a été viré violemment, ses affaires volées et « posées » sur une aire d’autoroute. Prétexte avancé : il aurait le coronavirus, vu qu’il revenait de Nantes. Même Macron ou un huissier n’aurait pas osé !
En fait, il avait la mauvaise habitude d’accueillir inconditionellement des gens au Rosier, ce qui apparemment ne plaisait pas à la Riotière qui voulait avoir la main sur qui habite là, et avait aussi posé une demande de permis de construire sur le Rosier pour concurencer le projet de A..
Ces coups de pression/démonstrations de force laissent présager d’autres actions de ce type dans les jours ou semaines à venir, car l’objectif qui mobilise cette énergie n’est pas encore tout à fait atteint. Les gens du Rosier vont avoir besoin de soutien physique et moral dans les prochains temps. Pour info, les apprenti.e.s huissier-ère-s n’aiment pas qu’on les filme ou les photographie, ni qu’on raconte ce qu’illes font, apparemment ça fait tâche sur les fables qu’illes savent si bien raconter pour vendre.
Une épine parmis d’autres.
PS : J’emploie les termes de « colons » et « colonisation », ce qui est très fort et pas forcément adroit utilisé dans cette situation, vu l’imaginaire que ce concept convoque et les pratiques bien plus hardcores et racistes auxquelles il renvoie, que ce soit dans le passé ou le présent. Le terme colonisation est le plus souvent associé à des entreprises de guerre et d’éradication des gens, de leur culture, qui vise à les faire « disparaitre » avec violence pour s’annexer leurs territoires et leurs richesses, et qui aboutissent à des processus de « racisation » politiques, économiques et idéologiques.
J’ai pas cherché à faire un parallèle avec des types de colonisations à grande échelle qui décrivent des phénomènes structurels de grandes ampleur, mais pour autant, j’ai pas trouvé de synonyme aussi satisfaisant pour décrire la dynamique dans laquelle m’ont l’air d’être les gens qui participent de près ou de loin à virer les gens du Rosier. Pour moi c’est une dynamique de spoliation réfléchie et organisée de terrains et de lieux de vie, qui s’est doté de ses institutions dans une optique d’hégémonie culturelle sur l’ex-zad, pour installer une activité marchande à la place de lieux de vie, en écrasant la gueule des plus faibles en profitant de sa position dominante et d’un rapport de force favorable.
Donc deso si c’est choquant pour des gens, pour l’instant j’ai pas trouvé mieux. J’aurais pu parler de gentrification ou d’expansionnisme mais dans ce cas précis je trouve que ça ne colle pas, parler d’envahissement ça me paraît un peu court, quant à conquête et occupation je trouve pas non plus que ça marche. Je veux bien entendre des propositions de modifications.
PS2 : Cet article, comme bien d’autres, sera surement censuré dans la plupart des médias « collaboratifs » ou « militants », vu qu’apparemment beaucoup ne veulent pas relayer les « embrouilles de milieu ou de voisinage ». Il y aurait pas mal de choses à dire là dessus, j’ai juste envie de dire que les « embrouilles de milieu » ça n’éxiste que pour celleux qui veulent invisibiliser ou dépolitiser des conflits, et surtout déconflictualiser le politique.
Des brochures pour tenter de comprendre les conflits politiques sur la Zad :
Le « mouvement » est mort, Vive... la réforme !
Le milieu est pavé de bonnes intentions
Des dynamiques inhérentes aux mouvements de contestation
Zadissidence 1
Zadissidence 2
Zadissidence 3
Des articles récents sur le Rosier, sans tri entre les différentes positions. Perso je trouve que les commentaires sous les articles sont souvent au moins aussi intéressants que l’article en lui-même.
Le Rosier - Petites histoires d’une Zone À Défendre
Attaques contre le Rosier (Zad)
Rosier cherche épines
Alerte, risque d’action milicienne dimanche 16/02 au Rosier
Alerte explusion au Rosier Sud
Zad, rosier, grée, violences sexistes et grande arnaque, la suite
Rosier 2k20, le film
Explication de l’intervention à la ZAD du 18 février
A propos de la tentative d’expulsion au Rosier
Une histoire du rosier
Le Rosier
Des articles récents, là aussi sans tri, qui parlent de l’ex-ZAD et permettent de continuer à se forger son propre avis :
Ex-zad NDDL - des ressources pour ne pas surnager dans le mépris
zad - des textes pour ne pas se noyer dans le ressentiment
zad bashing - la grande arnaque
Arrêt sur image des conflits politiques entre membres, complices du CMDO et non-signataires sur la ZAD de NDDL
Il y a deux ans : L’abandon de l’aéroport de Notre-dame-des-landes
Fête à la zad
Suite à l’incendie du hangar de l’avenir Droit de réponse de modérateurs.trices de la page facebook Zone à défendre de NDDL
Zad - Réaction suite à l’incendie au hangar de l’avenir Le texte qui a suscité le "droit de réponse
zad à propos du mythe des « collabos » et des expulsions
Publier des nouvelles de la zad
La libre diffusion de points de vues contradictoires est-elle responsable des conflits sur la Zad ?
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