Ça commence par l’histoire d’une maison squattée
Nantes, quartier de Procé. Un des quartiers bourgeois les plus chers de la ville, 4636 euros le m², excusez du peu.
Un groupe de personnes en galère de logement décide de squatter une baraque ("pas habitée depuis 2007" d’après une voisine). Normal... Sauf que, peu après l’emménagement, le proprio menace d’envoyer des gros bras pour tout défoncer, en assumant sans complexe qu’il passera outre les flics et la procédure légale. Est-ce la présence des potes venu·es en soutien qui l’a dissuadé ce jour-là ? Possible... Toujours est-il qu’un maçon venu pour murer la maison, la pensant vide, a confié aux squatters :« à votre place, moi je partirais ... » probablement par habitude des méthodes de son employeur.
Effectivement, quelques semaines plus tard, alors que la procédure suit son cours, environ 7 hommes cagoulés et armés de matraques télescopiques entrent dans la maison à coup de bélier [nb : seul·es les flics, les militaires et les pompiers sont autorisé·es à acheter ce genre de matos], en se faisant passer pour la police. Ils sont relativement structurés, obéissent à un chef, emploient un vocabulaire martial et technique, analysent froidement la situation pour en prendre le contrôle. Ils saccagent et cassent des vitres, défoncent la porte d’entrée de l’intérieur afin de la rendre inutilisable, les sanitaires, le four et des ordinateurs, et ordonnent de quitter la maison. Ils ont aussi tenté de s’en prendre à l’élec, mais à la matraque c’était pas terrible... Dans le même temps, ils frappent, menacent de viol, volent deux ordinateurs, un téléphone et un portefeuille. Ils ont aussi méthodiquement détruit les autres téléphones qu’ils ont pu trouver.
Ils reviennent couper l’électricité quelques semaines plus tard, en soirée alors même qu’il y a du monde à la maison. Coupant un câble haute tension à la disqueuse portative... plus d’élec dans le squat et... plus d’internet dans une vingtaine de foyers à la suite de la maison.
La 3e fois, le niveau de violence pète les scores : le commando revient, entre de nouveau à l’aide du bélier et remet la maison à sac. Alors que trois personnes encore éveillées les accueillent en jetant quelques cannettes puis se maintiennent dans le salon en faisant face aux assauts contre les portes, la dizaine d’hommes cagoulés gaze à la lacrymogène, frappe à la tête avec des matraques (même une personne endormie), tente d’attacher une personne avec des serflex, détruit à nouveau du mobilier (utilisant là encore une meuleuse portative pour ce faire), et répande un liquide nauséabond dans la maison. À leur départ, la maison est dévastée, les affaires sont cassées, couvertes de merde, de verre brisé, de gaz et de sang et quatre personnes partent aux urgences pour être suturées.
Last but not least [dernier point mais pas le moindre] : alors que les potes dépité·es se résignent à bouger leurs affaires et à retrouver leurs galères initiales, « on » a mis le feu à une voiture venue aider au "déménagement". Presque sous leurs yeux... et sûrement sous ceux de la voisine venue au squat raconter le lendemain ! enfin !!!
Car heureusement que dans ce monde de merde on peut toujours compter sur la solidarité des voisin·es ! ... Hé bé non, dans ce quartier propret où on entend les pas sur les feuilles mortes (intense l’ambiance), ni les bruits de verre brisé, ni celui du bélier, ni les cris de douleurs, ni les appels au secours ou au feu n’ont été jugés suffisamment inquiétants pour que quiconque ne se déplace ou n’intervienne d’une façon ou d’une autre...
Cela s’explique peut-être par le fait que le proprio (via une liste mail), qui fait partie de l’association de riverain·es, s’est présenté au début de l’occupation comme étant victime dans cette histoire, affirmant être terrorisé par ces vilain·es squatteur·euses à capuche. Méthode de fafs [faf pour france aux français] bien éprouvée désormais : véhiculer le sentiment d’insécurité auprès des habitant·es, tout en faisant monter le niveau de violence pour renforcer ce sentiment... et isoler les gens afin de s’assurer que personne ne leur viennent en aide. C’est bien un renversement des faits et de la situation pour créer la confusion très utilisé par l’extrême droite française comme le RN qui s’est joué là encore une fois. Durant toute la (courte) vie de cette occupation, les voisin·es sont resté·es méfiant·es, distant·es, suivant ainsi ce que le proprio avait énoncé sur la liste mail. Chacun·e chez soi, chacun·e sa vie de merde dans ce quartier qui pue le français de souche ! On peut aussi imaginer que ces gens s’identifient bien plus facilement aux problèmes du propriétaire qu’à ceux de squatteur·euses/SDF. Solidarité de classe oblige ! Pourtant quelques un·e·s viendront prendre des nouvelles et montrer une certaine solidarité le dernier jour... un peu tard quoi !
On peut aussi souligner les moyens déployés par le propriétaire. En effet, ce gars est capable de rassembler 6 ou 7 bonhommes (c’est pas exclu qu’il fasse lui-même partie du commando), sûrement en les payant (en thunes et peut-être même rincés à la cocaïne vu l’attitude de certains d’entre eux) pour saccager une baraque et éclater les gens qui y vivent afin de récupérer une maison qu’il a acheté ces dernières années et dont il ne fait rien.
À vrai dire, il ne fait pas tout à fait rien avec. Il a "cherché" à la vendre en la mettant en vente à un prix bien supérieur à ceux du marché. Personne ne s’est manifesté pour l’acheter : il s’apprêtait donc à la faire murer au moment où les squatteus·eurs l’ont prise, (désormais elle l’est).
On pourrait se dire que, pas de chances pour elleux, les squatteur·euses sont tombé·es sur un proprio véreux, membre d’une mafia sinon au moins d’un gang ultra-violent. C’est peut-être le cas, mais en apparence, les propriétaires sont tout ce qu’il y a de plus classique et intégrés dans ce monde... C’est là que ça devient rigolo. Les vrais bandits ne sont pas qu’en uniformes, ils portent aussi tranquillement le costard « fabriqué en France » et sont eux-même bien locaux.
Sur le papier, la maison appartient à la société Immonéo, co-gérée par deux frères, Jean-Philippe et Fabrice Hamon. En 2019, Immonéo a réalisé un chiffre d’affaire de plus de 8 millions d’euros… Immonéo est domiciliée à l’agence AJP de Châteaubriant, dirigée par JP Hamon. La maison a été mise en vente par l’agence immobilière AJP Immobilier Grand Nantes, dont le gérant est là aussi JP Hamon ! A vrai dire Jean-Philippe Hamon est dirigeant de plus d’une soixantaine d’entreprises : on va pas faire ici (voir ref 1) une liste qui pourrait être longue comme le bras, même si c’est intéressant à savoir puisque toutes ces adresses sont autant de moyens de saluer jean-philippe.
JP travaille souvent avec Fabrice, son frère lui-aussi à la tête de nombreuses sociétés immobilières, mais plus spécialisées dans le prêt immobilier, à l’instar de la société LOW TAUX (CA 1,5M d’€), présente à Nantes, Paris (sous le nom Hypo Bot) et Le Bouscat (33). On retrouve aussi souvent Virginie Hamon (la soeur), mais aussi Joël Hamon (leur père). On a ici à faire à un petit empire familial, fait de sociétés écrans, d’embrouilles pour frauder les impôts et de magouilles financières, comme il en existe plein d’autres en soi, la cour des riches quoi. (1)
Pour en revenir aux attaques qui ont eu lieues dans le squat, il semble évident que les types n’en étaient pas à leur coup d’essais : ils faisaient leur travail (sûrement plus un extra qu’un taf à part entière) et montraient une certaine habitude, voire une certaine assurance. Par déduction, on peut donc penser que cette milice est régulièrement employées par le clan Hamon qui doit y avoir recours aussi bien contre les locataires mauvais·es payeur·euses que contre les squatteur·euses. Dans un sens, on entre voit ici sûrement qu’une petite partie de l’iceberg Hamon.
Qui a les moyens de s’affranchir des lois, de constituer des réseaux mafieux à peine dissimulés, de s’accoquiner avec des types sans scrupules dont on n’a aucune idée des limites, le tout soutenu par la police et la justice... le pouvoir en place en somme.
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