Mardi 26 janvier, 12h30, grand soleil et chaleur inhabituelle sur le village de Bure. Les oiseaux pépient. Soudain un camion de pompier passe à vive allure toute sirène résonnante, direction du labo. Quelques minutes passent, puis un autre le suit dans le sillon de son écho. Le téléphone se met à sonner. « Allô ! Tu as vu ? » « Quoi ? » « Il y a eu un éboulement souterrain à l’ANDRA, deux personnes sont blessées, ils en ont parlé à la radio ! ». L’AFP relaie depuis déjà 10 minutes, la presse régionale et Europe 1 reprennent. « Ah mais c’est complètement dingue ! « . Les minutes passent, les coups de téléphone des charognards de l’actu s’enchaînent. « Allô c’est BFM TV on cherche des infos, on voudrait confirmer s’il y a bien un mort et un blessé grave, on n’est pas sûr ». Nous les éconduisons, et c’est ainsi qu’on commence à comprendre que le pire est arrivé : il y a bien un mort et un blessé grave.
Un sentiment curieux s’empare de nous, entre tristesse et rage pour les travailleur-euses victimes de cette folie, et le constat amer de voir le colosse aux pieds d’argile se tirer une balle dans le pied. Ou plutôt perdre les pédales, façon glissement de terrain. Contrairement à ce que certains médias racontent ce n’est pas le premier accident mortel qu’il y a eu sur ce site : en 2002 il y a déjà eu un mort, Eric Joly, sur le chantier de construction du laboratoire (Un documentaire de Camile Saïsset revient sur cet « accident » étouffé). Les procès et les enquêtes n’ont pas empêché le chantier de redémarrer bien vite, toute honte bue. Comme pour le chantier de l’EPR de Flamanville criblé de multiples scandales, dont 2 morts en 2011. Nous espérons qu’il en sera autrement aujourd’hui et que ce terrible accident signera l’arrêt définitif du projet de poubelle nucléaire, et de la filière dans son entier.
En effet alors que nous nageons en plein délire autour de l’estimation des coûts du CIGEO, cela laisse présager sans peine à quels points ces « accidents » – qui ne sont pas de petites bévues ponctuelles dans une industrie bien rôdée mais bien les conditions mêmes de la monstrueuse machine de mort nucléaire – se multiplieront si la construction de la poubelle est autorisée. Qu’elle coûte 35 milliards ou qu’on la ramène, selon les décrets proprement soviétiques de Ségolène Royal, à 25 milliards (au prix d’énormes réductions sur la « qualité » et la « sécurité » des chantiers, ou de recours à des travailleurs sous-traitants que l’industrie nucléaire aime tant exploiter…), les résultats seront les mêmes : une catastraphophe sociale, sanitaire, économique et écologique. Dont les morts seront directes et indirectes.
Voilà, on en est là : il n’y a pas de déchets nucléaires à Bure, et nous nous battons pour qu’il n’y en ait jamais, mais leur machine monstrueuse a d’ores et déjà semé la mort. Tout notre soutien et nos condoléances vont aux victimes d’aujourd’hui et d’hier de la folie nucléaire, à leurs familles, à leurs ami-e-s et leurs proches… Honte sur l’ANDRA et sa machine de mort !
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