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Syndicat : un cadavre à la renverse

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Syndicalisme et autonomie, quelle stratégie ?
Retour rapide sur la situation à Brest notamment.

Il y avait un rassemblement mercredi 5 mai à la gare SNCF de Brest à 10h, organisé par l’Union Locale CGT de Brest et le syndicat CGT Cheminots Brest et Landerneau contre « le projet de suppression de 8 postes fixes entre les gares de Morlaix, Landerneau et Brest », « avec notamment la suppression du poste d’agent d’accueil en gare de Brest ». Quartz Occupé (comprenant quelques syndicalistes CGT prenant beaucoup de place…) appelait aussi à la convergence des luttes et à se rendre au barbecue des cheminots et donc, y déplaçait son agora. Leurs luttes sont bien évidemment tout à fait légitimes.

Sur la page FB de CGT Cheminots Brest et Landerneau, ils se félicitent d’une fameuse convergence des luttes, mot galvaudé s’il en est !… Ils énumèrent ceux ayant répondu à l’appel, en plus de Quartz Occupé : « A cette occasion, sont venus nous soutenir les camarades du SYNPTAC (Syndicat National des Professionnels du Théâtre et des Activités Culturelles – CGT), de la CGT du CHRU de Brest, de la CGT Arsenal, du PCF, d’un adjoint à la mairie de Brest, mobilisés contre la casse du service public ferroviaire. ». Au micro également ce jour là, un délégué syndical cheminot CGT s’était aussi félicité de la « convergence des luttes »…

On espère qu’il ne croient pas sérieusement ce qu’ils affirment et qu’il s’agit là de communication et d’une volonté d’action stratégique plus que d’une description réaliste des forces en présence !?… Car de quoi s’agissait-il ? Surtout d’un entre-soi CGT ! Soit la convergence interne aux cheminots… Ainsi que que celle, beaucoup plus périlleuse, interne au syndicats CGT : le partage d’un moment convivial et l’établissement de contacts entre des syndicalistes cheminots, profs, soignants, intermittents… mais de la CGT !… Même si bien sûr la grande majorité des membres du collectif Quartz Occupé qui étaient présents ne sont pas syndiqués...

L’annonce était publique mais le déroulé des événements se faisait chez les cheminots, il fallait passer une barrière symbolique et aller dans leur espace plus ou moins privé… autant dire que ce n’était plus vraiment sur la place publique. Cet entre-soi se déroulait aussi lors de la grève contre la réforme des retraites commencée au 5 décembre 2019… Là encore, un certain entre-soi et finalement une corporation qui fait plus ou moins cavalier seul, acceptant tout de même la récolte de caisses de grève venues de l’extérieur mais peu enclines à se mélanger… notamment avec tout ce qui ne leur paraît pas assez clair : citoyens en tous genres, Gilets Jaunes, anarchistes, autonomes etc. Bref, tout ce qui sort un peu des clous, veut réaliser des actions de blocage démocratiquement décidées à la base en des AG ouvertes à tout le monde et agir de manière un peu plus « déterminée » en évitant l’écueil hiérarchique !…

Ce 5 mai 2021, malgré cet entre-soi, des citoyens sont venus, ils sont oubliés de la longue liste de remerciements du post mentionné ci-dessus concernant quasi-exclusivement des syndicats CGT… Ils oublient même les autres syndicats présents (Solidaires, CNT...) : plus corpo tu meurs ! À peine arrivés sur place, ça ne donnait pas vraiment envie... On avait plutôt envie de les laisser entre eux. Une GJ n’a pas osé mettre son GJ, on est pas chez nous quoi et puis ça pourrait heurter les susceptibilités… Elle finira par partir ne se sentant pas trop à sa place. Alors que pourtant, en tant qu’usagère de service public que devrait être la SNCF, elle avait des choses à dire : elle ne voulait pas « que les humains soient remplacés par des machines ». On pense à tous ceux qui n’ont pas internet ou ne le maîtrisent pas, quel calvaire ça doit être pour prendre un billet, au prix le moins cher possible etc. Déjà que même si l’on a et maîtrise les outils numériques c’est plutôt pénible et compliqué !…

La CGT, les cheminots, se félicitent donc d’un début de bribe d’avancement de convergence des luttes interne à la CGT ! On peut en rire mais le pathétique de la situation a quelque chose de consternant, presque triste et dit beaucoup de ce qu’est le syndicalisme aujourd’hui : corporatiste, incapable d’une solidarité inter-professionnelle et de coordination interne et encore moins d’ouverture sur l’extérieur, c’est à dire à la population. Et pourtant, seuls 11% des salariés français adhèrent à une organisation syndicale (données de 2016). Donc à diviser entre les divers syndicats mais autant dire que ce que représente la CGT se réduit à peau de chagrin… Et pourtant, la plupart du temps, ils se comportent comme s’ils devaient être le pivot principal de tout le mouvement social et s’accaparent les manifestations, puisqu’ils les ont bien gentiment déposées en préfecture… ainsi que la parole. Autrement dit, la CGT, fermée, est aujourd’hui une force contre-révolutionnaire, gestionnaire avec le gouvernement et le patronat du moins disant social, dans un « dialogue social » qui n’est qu’une mascarade et devient franchement humiliant !

La forme semble aujourd’hui sclérosée. Le nombre d’adhérents n’en finit pas de chuter, ils sont en état de déliquescence mais se comportent en maîtres du jeu, comme si tout devait encore passer par eux. La CGT doit s’ouvrir à d’autres formes de luttes, plus en auto-organisation. Il pourrait en premier lieu s’agir d’alliances de circonstances, in situ, entre des syndicalistes de la base, combatifs voire révolutionnaires, avec des citoyens en des AG ouvertes à tout le monde mais pour construire une proposition politique qui sortirait de l’amoncellement de revendications catégorielles, ceci afin de tenter de construire un véritable mouvement de masse dépassant la simple addition de luttes séparées. Mais pour cela il faut un élément transcendantal, d’autres diront une utopie, c’est à dire sortir de luttes uniquement défensives plus ou moins corporatistes mais proposer plutôt quelque chose qui pourrait servir la quasi-totalité de la population, à savoir en priorité ceux qui ne possèdent pas les moyens de production.

Car il n’y a pas de secret, l’appropriation collective comme horizon -même si l’idée peut paraître une réminiscence du passé- peut unifier les divers mouvements sociaux. Il nous faut donc reprendre le pouvoir sur le travail, sur la propriété d’usage de l’outil de production afin de décider de notre sort : quels investissements voulons-nous, pour produire quoi, comment, à quelle rémunération, en quelle quantité et surtout : pour le bien commun, social comme environnemental !
Par exemple, se battre pour l’arrêt des privatisations et au contraire la restauration de services publics de qualité pourrait convenir à une grande majorité de la population et sortir de la revendication catégorielle même s’il est probable que ce soit des gens de tel ou tel service public qui seraient à l’origine de ces propositions politiques.

Car oui, il nous faut faire de la politique, c’est à dire monter en généralité, proposer une vision d’ensemble sur le fond et coordonnée sur la forme. Sortir de l’entonnoir corporatiste à court terme et penser notre stratégie : viser le long terme et non uniquement la réaction tactique à des agressions du corps social.

Vue l’époque et la désaffection des syndicats, cela ne pourra pas se faire dans cette forme. Il nous reste à inventer autre chose en prenant garde à, si l’on critique la verticalité et l’effet pyramidal qu’implique la bureaucratisation syndicale, ne pas tomber dans l’excès inverse, à savoir un démocratisme stérile à force de décider de tout, tous et tout le temps… L’autonomie doit nous servir à agir rapidement et simplement de manière souple en laissant une large part à l’initiative individuelle (indispensable, surtout par temps d’individualisme très prégnant même en milieu militant...). Elle n’est pas une fin en soi, ainsi que la démocratie à l’intérieur du mouvement social. Il ne faut pas perdre de vue que l’adversaire, lui, agit vitre et de manière plutôt coordonnée, il nous faut en faire de même et ne pas nous perdre en délibérations sans fins mais plutôt faire de l’agitation militante afin d’élargir nos rangs et de politiser. Cette effervescence ne peut se faire que si chacun se sent libre d’agir (seul ou en petits groupes), sans toujours en référer à quiconque !…

Ni caporalisme, ni spontanéisme, pour un mouvement de masse ! Il faut le reconnaître, ce n’est pas gagné et le risque, plutôt qu’une révolution (avec comme but la reprise en main des moyens de production par le peuple), est bien plus l’émergence d’un État de plus en plus autoritaire, avec un gouvernement qui le serait d’autant plus. Et ceci, Marine Le Pen ou pas au pouvoir. La gauche est faible ! Elle paye aujourd’hui l’abandon de la classe ouvrière, le social-libéralisme, les dérégulations par l’ouverture à la mondialisation et au marché à tous crins des 40 dernières années, accélérant la désindustrialisation en France et la mise en compétition des travailleurs français avec des pays à moindres coûts salariaux et normes environnementales.
Il se pourrait bien que 2022 soit l’enterrement quasi-définitif de la forme social-démocrate. Espérons que du désastre annoncé surgira un camp clair et coordonné, sur une ligne de lutte des classes et d’expropriations, continuant l’histoire du mouvement ouvrier qui visait bien pendant longtemps à changer de système socio-économique ainsi que politique voire culturel, bref, tout un monde à gagner ! C’est bien cette histoire que nous devons prolonger, en nous y ressourçant. Amen ! Pardon, ahou.

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